Nos Livres
"Au fil de nos cheminements littéraires"

Trois femmes,
trois destins -
Kiev, Berlin, Paris.
Une enquête palpitante
sur le chemin des
Origines.
Nous portons en nous, cachée dans les tréfonds de notre inconscient, l'histoire de nos ancêtres. Lorsque ce passé est douloureux ou tragique, il hante les présents. Tel est le constat que dresse Anouchka, l'héroïne du roman. « C'est une erreur de penser que l'on peut enterrer le passé. Il s'accroche tant et si bien qu'il remonte toujours à la surface, tel le corps d'un noyé », écrit-elle.
Au départ, il y a une lignée de femmes, un lien d'amour qui se transmet de mère en fille. Dina, Rebecca, Raïssa, Claudie, Anouchka, Sacha, ressemblent à ces poupées russes qui s'emboîtent les unes dans les autres. « Chaque nouvelle vie enfonce ses racines dans la chair de sa mère et les racines des unes s'entremêlent à celles des autres », écrit Anne Bassi en introduction de son ouvrage. Anouchka vit une relation fusionnelle avec sa grand-mère Raïssa. La mort de cette dernière est une douleur dont elle ne se remet pas, malgré les années qui passent. La vie d'Anouchka est pourtant réussie : elle a suivi la tradition familiale, est devenue avocate et a une fille, Sacha, qui la comble. Mais quelque chose en elle ne guérit pas, elle aspirée par un trou noir qu'elle ne parvient pas à comprendre.
Afin de se délivrer de son mal-être, elle décide de consulter un thérapeute, spécialiste de la méthode « NTCV », appelée également « brainspotting ou EMDR ». A l’aide d’une baguette, presque magique, il utilise la puissance du regard afin de stimuler l’émotionnel enfoui dans un recoin du cerveau profond. C'est lui qui va ouvrir le « tiroir à secret » avec une question simple : « Comment est morte Rebecca, la mère de Raïssa ? ». L'interrogation claque comme un coup de feu dans le silence. Elle pressent qu'il y a là un secret de famille, lourd et noir qui explique aussi cette « ombre silencieuse » portée sur toute la lignée. « Cette invitation à la curiosité la transporta dans le passé, celui d'avant ses souvenirs, à la recherche de Rebecca dont plus personne n'osait parler. »
Anouchka commence des recherches avec l’aide d’un généalogiste et entraîne le lecteur en Ukraine, là où es née Rebecca, puis à Berlin, et enfin à Paris. La famille doit fuir à plusieurs reprises, s'exiler pour trouver, au moins pendant quelques années, la paix et la sécurité.
Anouchka reconstitue cet itinéraire, retrouve des photos, des documents, et découvre même l'existence de membres de sa famille dont elle ignorait tout. Un pan caché de son histoire lui est ainsi révélé. Des mots, des photos, de la musique, viennent compléter la partition de sa vie, et vont lui permettre de saisir l’origine de ses angoisses, puis de s'apaiser. « Chacun d'entre nous est inscrit dans une lignée familiale, et l'origine de nos souffrances date parfois de temps lointains. Pourtant, ce que l'on ignore est tout aussi important que ce que l'on sait. Les non-dits deviennent des secrets qui deviennent nos fantômes. Les secrets de famille se font ainsi nos maîtres silencieux, et parfois ceux de nos destins. »
Un roman sensible où l’auteur analyse avec finesse les émotions de l’héroïne et nous initie à la psychogénéalogie, aux serments silencieux. « Elles avaient tracé un cercle silencieux (…), les mots jamais dits devinrent une réalité invisible entre elles. Anouchka devint une petite fille que le silence passionnait, elle devint le silence, elle devint la prisonnière et la geôlière de ce silence ».
Trois questions à Anne Bassi :
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« Le silence des Matriochkas » est votre premier roman. Il est inspiré de faits réels. Quand avez-vous décidé de l’écrire et quelles ont été vos sources d’inspiration ?
Je n’ai pas décidé à un moment précis d’écrire un roman. Cela s’est fait progressivement à partir de faits imaginaires et réels dont m’ont fait part des hommes et des femmes. Petit à petit, j’ai construit un récit à partir de leurs vies et de thèmes qui me tenaient à cœur depuis longtemps : la transmission entre les femmes d’une même lignée, la mémoire, les secrets de famille, la psychogénéalogie et le métier d’avocat. J’ai été amenée à faire des recherches sur ma famille en France, en Ukraine et en Allemagne. C’est ce qui a permis de construire ce roman sous la forme d’une enquête.
Je m’interroge sur la transmission entre les femmes d’une même lignée. Les mères sont des relais, elles transmettent le passé et la mémoire. C’est une transmission qui nous dépasse. Mais ce n’est pas un roman dédié aux femmes. Il concerne tous ceux qui s’intéressent à leur histoire et à leur héritage. Nous sommes le fruit de notre histoire familiale, nous en conservons la mémoire et nous devenons ainsi des témoins innocents.
2. Votre livre est un voyage dans le temps et dans l’espace. Il débute en Ukraine en 1885 et se termine à Paris à l’époque actuelle. Pourriez-vous revenir sur les périodes que traversent les personnages principaux ?
Il y a trois périodes dans le livre. La première concerne l’Ukraine de 1885 à 1926. Rebecca et Raïssa sont nées en Ukraine et vivent les pogroms et de la Révolution. Elles appartiennent à une famille d’intellectuels pour qui le socialisme apportera l’émancipation et l’égalité. La famille quitte l’Ukraine en 1926 et s’installe peu de temps en Allemagne pour des raisons professionnelles, le père de Raïssa, Moïse est ingénieur. La seconde période du roman concerne leur installation en France où Raïssa étudie le droit et devient avocate dans les années 30. Après avoir été radiée par les lois de Vichy, elle se réinscrit au Barreau avec son époux, Charles. Ils trouvent leur raison d’être dans le combat politique, ils sont avocats par vocation, par amour de la liberté, par aversion de l’arbitraire et de l’injustice. Raïssa donne naissance à deux filles, Claudie en 1944 et Danie en 1946. La dernière période concerne la quatrième génération, représentée par Anouchka, la fille de Claudie. Elle se déroule à Paris à la recherche du passé, des morts et des vivants.
3. Le personnage d’Anouchka est écrasé par un secret de famille. « Ce secret inavouable et indicible que Raïssa ne pouvait dévoiler était devenu leur secret, elles en étaient codétentrices. Il était leur complice ».
Les secrets inavoués, inavouables sont écartés de nos vies conscientes et ne peuvent pas recevoir d’inscription verbale dans la mémoire familiale. Pourtant, les émotions condamnées au silence par absence de verbalisation sont toujours actives. Tout se passe comme si on ne devait pas oublier certains évènements. Ni les oublier, ni en parler, les transmettre mais sans le dire.
Si vous souhaitez vous procurer le livre d'Anne Bassi :


Extrait du BULLETIN DES FFDJF • N°146 & 147 • SEPTEMBRE 2020
DES FEMMES DANS LE BUREAU DE L'ENFER
◆ UN RÉCIT HALETANT SERVI PAR UNE PLUME TALENTUEUSE
Une fois encore, Serge Klarsfeld vient d'extraire des limbes de l'oubli un récit époustouflant, celui de Raya Kagan qui fit partie du convoi numéro 3 en date du 22 juin 1942, le premier à emporter 66 femmes à Auschwitz, après avoir été incarcérées au camp des Tourelles et à Drancy pour non respect de la réglementation antijuive ou implication dans des affaires touchant à la sécurité, comme ce fut le cas de Raya Kagan. C'est en 1945, que Raya Kagan gagna la Palestine Juive, où elle publia son témoignage 2 ans plus tard en Hébreu sous l'égide des Editions SifriatHapoalim, mais en si peu d'exemplaires que son destin fut d'être introuvable, et traduit en aucune langue. Aussi, dès 1976, en préparant le « Mémorial de la Déportation des Juifs de France », Serge Klarsfeld eut connaissance de ce récit pour lequel il envisagea de le faire traduire en Français, « mais d'autres priorités à l'époque l'en empêchèrent »Aujourd'hui, tel n'est plus le cas. C'est en effet tout à l'honneur du président des FFDJF d'avoir assumé les frais de la traduction et de l'édition de ce récit faisant état du premier convoi de femmes par cette survivante, née en Ukraine en 1910, qui témoigna au procès Eichmann le 8 juin 1961. Raya Kagan, née Rapoport, qui gagna la France en 1937, soupçonnée d'appartenir à un réseau de résistance communiste à « la suite de la mort de deux militants tués dans l'explosion d'une bombe qu'ils préparaient dans une chambre au 49 rue Geoffroy Saint Hilaire, où Raya avait logé et laissé des lettres », lui valut d'être arrêtée et déportée. Intellectuelle, parlant parfaitement cinq langues, Raya Kagan fut peu de temps après son arrivée à Auschwitz affectée au Bureau d'État Civil du camp principal avec ordre d'enregistrer les décès des déportés, qui avaient été autorisés à entrer dans le camp, (les seuls à être enregistrés) ; les autres étant immédiatement dirigés vers la chambre à gaz. Le convoi 3 comprenait 933 hommes et 66 femmes. Comme le souligne Serge Klarsfeld : « Tous sont entrés dans le camp sans sélection pour la chambre à gaz. 5 femmes sur 66 survécurent: Raya Kagan, Claudette Bloch, Henriette Bolotin, Estera Solarz et Rywka Spzepsman. Dans le convoi 7 où 49 femmes du camp des Tourelles furent déportées sur un total de 121 femmes, une seule a survécu, Johanna Gans, dont la déposition en 1945 figure en annexe, et qui fut désignée elle aussi, comme secrétaire au Bureau politique du camp. » Claudette Bloch (citée dans l'ouvrage) témoigna également auprès des inspecteurs du Service de recherche des crimes de guerre en 1945. Raya Kagan après son Alya fut recrutée par le Ministère Israélien des Affaires étrangères où elle occupa nombre de postes importants. Elle s'est éteinte en 1997 à l'âge de 87 ans. Reste son récit présenté par Serge Klarsfeld, un récit peu commun, haletant, où à l'aide d'une plume soignée, l'auteur dépeint les étapes de sa trajectoire dantesque, à commencer par les Tourelles, où furent incarcérées avec elle, les admirables « Amis des Juifs. » La puissance de ce récit est de rendre perméable la moindre situation, le moindre dialogue, à l'aide d'une sémantique obstinée à ne laisser aucun détail de côté. A l'instar, d'une véritable caméra rendant le son et l'image. Et ce, par la seule magie de l'écriture ! Grâce à ce témoignage si prégnant, on appréhende de façon hallucinée de quelles façons fonctionnait la logistique du crime de masse, et comment se déroulait le quotidien de ses esclaves Juives affectées dans les Bureaux du camp, soumises au pouvoir
sadique des maîtres des lieux. Rien n'échappe à l'œil de Raya, les noms, les dates, les évènements les plus ordinaires, comme les plus tragiques, notamment « les Marches de la Mort », dont elle sortira indemne. Un grand livre. Un des très grands livres sur la Shoah, étayé à la fin de documents et d'annexes éloquents.
Claude Bochurberg



Je parcourais minutieusement les allées en apparence dépouillées de tout parchemin de vie témoignant encore, à qui voudrait l’entendre, du parcours personnel autant que de la carrière hors normes du violoniste d’origine ukrainienne Mischa Elman et menais depuis quelques semaines méthodiquement mon enquête sur cet artiste lorsque je découvris le 31 janvier 2020, les biographies des grands violonistes du XXe siècle racontées par Jean-Michel Molkhou (1), parues en deux tomes édités par Buchet/Chastel respectivement en septembre 2011 et en octobre 2014. A cette époque, je venais de procéder à l’examen attentif de la partition musicale de « Après un rêve » de Gabriel Fauré, transcrite par Mischa Elman (2) afin d’approfondir ma connaissance de son jeu musical et j’étais quelque peu agacée de vérifier, lecture après lecture, étude après étude, que la musique demeurait encore bien trop souvent un « domaine réservé » à une minorité, un art fermé au plus grand nombre. Dans ce contexte précis, je me souviens alors m’être dit : « Allez, je parie que c’est encore un bouquin hors de portée du plus grand nombre, comme si la musique ne devrait être réservée qu’à une « élite », à une toute petite minorité coupée du reste de la société … Voyons tout de même comment cet auteur aborde l’univers des grands violonistes du XXème siècle … »
Est-ce l’art manifeste de Jean-Michel Molkhou de savoir manier avec maestria plusieurs cordes à son arc, à la fois chirurgien de métier, violoniste passionné par la lutherie et l’archèterie, devenu ensuite critique musical pour la revue Diapason, qui lui permit de ne pas se laisser bercer par les sirènes d’une approche très technique fréquemment réservée à un cercle en vérité restreint de mélomanes, musiciens, violonistes et/ou professeurs de musique ? Je ne le sais, mais ma première véritable agréable surprise fut de découvrir, en feuilletant le premier tome consacré à la présentation de cinquante violonistes de la première moitié du XXème siècle, qu’un chapitre entier avait été réservé à Mischa Elman. Fait suffisamment rare pour s’en étonner finalement, car là n’est pas le moindre des paradoxes de l’histoire de Mischa Elman : sa vie et son talent, dignes d’un roman historique né sur l’arrière-scène tragique d’une Russie ravagée par les pogroms jusqu’à son éblouissante épopée américaine où il sut déployer les ailes de phénix de son violon au son d’or et graver de l’empreinte sensible de son archet les cœurs et les âmes de millions de gens, ne firent pour autant l’objet de quelques résiduels écrits à son sujet.
Dans un style synthétique et sans révéler ici le détail de ce qu’écrit Jean-Michel Molkhou au sujet de Mischa Elman afin de vous encourager à vous plonger, au-delà même de l’histoire de Mischa Elman, dans la lecture passionnante de ces deux ouvrages, frappant est de constater combien, sur le fond, cet auteur sait dire l’essentiel en peu de mots finalement et s’inscrire dans une démarche teintée d’humilité. Ainsi, au terme des cinq pages dédiées à Mischa Elman, vous voyagez avec lui comme s’il était encore des nôtres, de Talnoï à Odessa, puis de Odessa à Saint-Pétersbourg, Paris, Berlin, en Allemagne, en Autriche, en Scandinavie lors de ses premières tournées en Europe jusqu’à New York. Par ailleurs et bien que le tableau que dresse Jean-Michel Molkhou du parcours aussi atypique qu’exceptionnel de Mischa Elman complète presque parfaitement les termes de l’article « Le violoniste Mischa Elman », très différent d’approche et de sensibilité, de Charles Godszlagier paru sur le site Les Amis d’Odessa, il n’en demeure pas moins que personne d’autre que cet auteur n’a su résumer de manière aussi édifiante qu’il le fit ce que représenta en son temps le son du violon de Mischa Elman : "Écouter aujourd’hui le violon de Mischa Elman, c’est un peu comme feuilleter des photographies de Saint-Pétersbourg d’avant la révolution d’Octobre. On y redécouvre les fastes, les dorures et les larmes d’une civilisation à jamais disparue. Un violon qui vous tire des larmes dans ce Concerto de Tchaïkovski qui fut longtemps considéré comme le « sien »" (pp. 73-80, tome I).
La singularité et la dimension pédagogique de la démarche de Jean-Michel Molkhou caractérisent l’ensemble des deux tomes de son étude, excentrées des sentiers techniques et du vocabulaire spécifique à l’univers de la musique : elles lui permettent ainsi de lier et de relier l’histoire individuelle de chaque violoniste du XXe siècle dans le cycle d’une histoire humaine plus globale et de la grande Histoire de l’humanité tour à tour partagée entre ombre et lumière. De fait, l’auteur inscrit chaque trajectoire personnelle dans un contexte géographique, historique, socio-économique, familial et culturel propre à chacun. Au fur et à mesure que vous avancerez dans votre lecture, vous entreprendrez en vérité un long périple, des contrées de Russie (Mischa Elman, Toscha Seidel, Nathan Milstein, David Oïstrakh, Isaac Stern …) à celles de l’Europe de l’Est (Vilnius, Budapest, Prague, Vienne, Trieste, Zelazowa Wola près de Varsovie où vit le jour le violoniste Henryk Szeryng et qui était déjà ville natale de Frédéric Chopin ….) où naquirent les plus grands musiciens. L’auteur retrace également le parcours de quelques violonistes célèbres, anciens ou contemporains venus d’autres nations du continent européen, de la France (Jacques Thibaud né à Bordeaux en 1880) à l’Angleterre (Albert Sammons, autodidacte né à Londres en 1886), en passant par l’Allemagne (Anne-Sophie Mutter, née en 1963), les Pays-Bas (Janine Jansen, née en 1978) … sans oublier les États-Unis (Oscar Shumsky, Gil Shaham), le Canada (Leila Josefowicz), le Japon (Kyoko Takezawa), l’Arménie (Sergey Khachatryan) … La musique a ceci de magique qu’elle n’a pas de frontières et nous enseigne en permanence que ce qui est beau existe et peut s’entendre sur tous les continents de notre planète Terre. Dans ce tableau exhaustif à souhait, je n’exprime qu’un seul regret : aucun chapitre n’est consacré au violoniste juif russe, Sascha Jacobsen, juif russe né à Helsinki en 1895 devenu pourtant le sujet de l’une des chansons interprétées en 1922 par George Gershwin et intitulée « Mischa, Jascha, Toscha, Sascha ».
Certaines anecdotes ne manqueront pas de surprendre, d’émouvoir, de faire rire, telle l’histoire de Joseph Fuchs, né en 1899 à New York dans une famille de musiciens et qui, après s’être cassé le bras à l’âge de trois ans, débuta le violon « en guise de rééducation » ! Mais au-delà du talent de pédagogue de Jean-Michel Molkhou, talent qui lui permet d’encourager le lecteur à s’interroger sur les motivations profondes de certains de ces violonistes et les raisons pour lesquelles leurs interprétations ont également parfois survécu à l’épreuve redoutable du temps, la singularité de sa démarche se manifeste tout autant par sa capacité à ne jamais enfermer aucun de ces grands violonistes dans le seul registre de leur univers musical. Ainsi, dans un long chapitre retraçant l’histoire et le parcours musical de Yehudi Menuhin, né à New York en 1916 de parents juifs russes, l’auteur n’hésite pas, contribuant de la sorte au développement d’une culture générale accessible au plus grand nombre, à remémorer combien il fut préoccupé par l’éducation artistique ainsi que ses engagements forts de citoyen : dès 1950, il prend fait et cause contre l’apartheid en Afrique du sud, ce qui n’était pas si fréquent à l’époque ; plus tard, il s’investira dans le rapprochement entre Israéliens et Palestiniens, puis il s’engagera aux côtés de Amnesty International. Mais Menuhin, Jean-Michel Molkhou est un des rares à le souligner, c’est aussi celui qui n’avait jamais oublié la Russie bien qu’il n’y soit pas né. Ni la Russie ni les parcours de dissidents, qu’ils fussent liés à cette nation ou pas. Ainsi, Menuhin fut, ne l’oublions jamais, celui qui usa, à juste raison, de sa notoriété pour faire libérer Mstislav Rostropovitch d’URSS, mais également, on le dit moins, pour sortir le pianiste argentin Miguel Angel Estrella des geôles uruguayennes.
Une fois entré dans l’univers géographique, familial, culturel, musical de chacun de ces violonistes, leurs histoires individuelles réunies nous démontrant au passage que derrière un grand musicien existe déjà le plus souvent dans la cellule familiale une fibre artistique ancrée depuis longtemps et/ou confirmée, le lecteur peut compléter sa découverte en écoutant le CD qui offre plus de huit heures de musique. A titre d’exemple, Jean-Michel Molkhou propose l’extrait sonore que voici concernant le violoniste Ivry Gitlis, né à Haïfa en 1922 dans une famille d’origine russe :
« Béla Bartόk : Concerto n°2, I. Allegro non troppo.
Avec l’Orchestre Pro Musica de Vienne, dir. Par Jascha Horenstein. Enreg. 1954. Vox PL 9020. Rééd. Vox CDX2 5505. 14’47.
Cet enregistrement volcanique du Second Concerto de Bartόk est resté l’un des sommets de la discographie du violoniste comme de l’œuvre. »
En toutes circonstances, Jean-Michel Molkhou sait à la fois s’adresser aux mélomanes en citant, par exemple, sur quel violon ont exercé leurs talents certains des immenses violonistes du XXe siècle, et interpeller les profanes sans jamais muer son propos en une encyclopédie de termes spécifiques à l’univers de la musique en général et des violonistes en particulier quand il se réfère à la discographie de chacun d’eux : c’est là tout l’art et l’intérêt de découvrir les biographies de si nombreux violonistes, demeurés célèbres ou tombés dans l’oubli, retracées avec tact et élégance par Jean-Michel Molkhou. Alors, je vous invite à partir à leur rencontre dès à présent, car le message universel de la musique autant que l’univers émotionnellement si passionnant de l’art du violon, ces biographies convaincront ceux qui en douteraient encore, sont à eux seuls une perpétuelle leçon d’humanisme dont a bien besoin notre monde actuel.
Ivana Sion.
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Jean-Michel Molkhou, Les grands violonistes du XXe siècle, Buchet/Chastel :Tome I – De Kreisler à Kremer,1875-1947, Tome II – 1948-1985.
2. Gabriel Fauré, Après un rêve, Transcribed by Mischa Elman, Violin and Piano chez Carl Fischer.

Bibliographie
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